Koering, Jérémie (éd.) - Klein, Robert: L’Esthétique de la technè. L’art selon Aristote et les théories des arts visuels au XVIe siècle, 320 p., 17 x 26 cm, ISBN-10 :2-917902-37-X, 29 €
(Les édtions de l’INHA, Paris 2017)
 
Rezension von Sabine Guermouche, EHESS
 
Anzahl Wörter : 3288 Wörter
Online publiziert am 2018-10-31
Zitat: Histara les comptes rendus (ISSN 2100-0700).
Link: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=3303
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          LEsthétique de la technè est le premier ouvrage de la nouvelle collection « Inédits », publiée par l’Institut national d’histoire de l’art, pour rendre accessibles des manuscrits et des archives conservés dans les fonds de sa bibliothèque. Ce n’est peut-être pas un hasard que ce soit la première des deux thèses de troisième cycle de Robert Klein, préparée sous la direction d’André Chastel, qui ouvre cette collection, puisque cette recherche inédite témoigne de l’intérêt que le chercheur roumain a lui-même toujours porté aux archives. Robert Klein, philosophe et historien de l’art fermement inscrit dans la « cosmogonie  théorique » qui, à la fin des années cinquante en France, fit qu’un certain champ des recherches en histoire de l’art emprunta une traverse résolument plus théorique. Sa mort prématurée et soudaine laissa malheureusement en suspens ses importants travaux. Certains de ses articles et essais ont été rassemblés dans La Forme et l’intelligible : écrits sur la Renaissance et l’art moderne, paru à titre posthume en 1970, ouvrage édité par André Chastel assisté, entre autres - il  faut le souligner - par Henri Zerner, Hubert Damisch et Paul Ricœur. La trentaine d’articles qui y sont présentés dévoile l’incroyable érudition de Robert Klein tout en attestant la naissance de certaines formules appartenant désormais à la phraséologie de la théorie et de l’histoire de l’art. On pense notamment à « cette science sans nom », formule mainte fois empruntée par le discours critique sur la pensée de l’un des instigateurs de l’iconologie, Aby Warburg ; reprise notamment par Giorgio Agamben dans son essai : Aby Warburg et la science sans nom.

 

            Dans la présentation de cette archive inédite qu’est L’Esthétique de la technè, Jérémie Koering retrace l’aventure éditoriale de cette publication et révèle la destinée singulière de ce texte. Le caractère inachevé, lacunaire, l’hétérogénéité des matériaux, la forme hybride du tapuscrit aux multiples « paperolles » collationné sans qu’il soit possible de s’appuyer sur un véritable plan définitif ont présenté quelques obstacles à son édition. Il importe donc de garder à l’esprit que l’articulation du texte édité, l’agencement des chapitres « n’est pas celui auquel Klein a[vait] finalement songé, mais l’état transitoire d’une œuvre encore et toujours en suspension » (p. 19).  Toutefois, étant donné qu’on a bien affaire à une thèse, il eut été dommage que, malgré les difficultés, on ne puisse tirer profit de cette précieuse réflexion qui, par sa densité, constitue un réel apport à certains de ses travaux publiés. Nous y reviendrons.

 

            L’Esthétique de la technè nous place au cœur d’une élaboration théorétique, dans les plis d’une pensée rigoureuse et précise qui, d’analyses en analyses, se découvre. Outre la rigueur scientifique que ce travail laisse ressortir, son appareil analytique et critique est impressionnant : une concentration de sources essentiellement en latin, italien, grec puisées dans les ouvrages des écrits sur l’art embrassant une période assez vaste, du Moyen Âge à l’âge baroque. Par ailleurs, la structure linguistique et terminologique de cette étude laisse apparaître un point de méthode et non des moindre de Robert Klein : face à la richesse sémantique de nombreux concepts, Klein ne se résout jamais à trancher dans la traduction, mais cherche toujours à proposer des solutions à mi-chemin entre le commentaire et la traduction.  

 

            Robert Klein introduit sa thèse en s’appuyant sur la formule que Benedetto Varchi, illustre Trattatiste du Cinquecento, livra lors de ses Due Lezzioni, publiées en 1549 à Florence : « L’arte è uno abito fattivo, con vera ragione, di quelle cose che non sono necessarie, il principe delle quali non è nelle che si fanno, ma in colui che le fa (L’art est une disposition de faire, suivant la règle, de ces choses qui ne sont pas nécessaires et dont le principe n’est pas dans les choses qui se font mais dans celui qui les fait) ». Pour exposer le problème qui est au cœur de sa réflexion et désigner les enjeux théoriques de sa thèse, Klein choisit délibérément ce passage qui ne mentionne aucunement « l’inévitable mimésis » ; au contraire la contingence de l’art (ces choses qui ne sont pas nécessaires) et l’arbitraire de l’artiste sont expressément opposés à la nécessité interne des produits de la nature, qui ont leur « principe » en eux-mêmes et non dans « celui qui les fait » (p. 47). Klein va réinvestir cette période et cette convention terminologique dites maniéristes (1520-1620) pour nuancer une tradition historiographique essentiellement allemande (p. 48). Précisons que lorsque Klein entreprit cette thèse entre 1959 et 1962, les artistes qualifiés de maniéristes l’étaient essentiellement au nom de qualités d’essence platonicienne, de théorie du génie et d’expression individuelle. Pour autant, Klein ne cherche pas à supplanter radicalement ce courant historiographique ni à rejeter cette vision idéaliste néoplatonicienne, mais plutôt à dégager un nouveau paradigme, pour densifier les études sur ce courant, pour adopter une position plus critique. Klein va ainsi ressaisir l’écheveau de cette période, en s’appuyant sur l’un des prédicats de Varchi : « l’art ne « crée » pas, il fabrique des choses suivant leur vera ragione (…), c’est-à-dire suivant la règle » (p. 47).

 

            Pour Klein, l’énoncé de Varchi, ne serait en rien contemporain du Cinquecento, mais plutôt « un essai de transformer en philosophie des beaux-arts, ce qui fut pendant tout le Moyen Âge, une théorie des artes mécaniques et libéraux », la théorie aristotélicienne de la technè, présentée dans L’Éthique à Nicomaque qui, grâce à la paraphrase d’Averroès, traversa une partie de la période médiévale. (p. 48-49).

           

         La théorie aristotélicienne de la technè rend compatible et articule l’art comme fabrication et l’art comme faculté (p. 119). La notion de technè contiendrait implicitement deux théories des « beaux-arts », deux esthétiques en puissance. Klein qualifie la première de « magique », parce que littéralement incarnée par la philosophie hermétique issue de la tradition plotinienne, conçue comme relevant des mouvements de l’imagination de l’artiste. Cette conception esthétique aurait été la plus courante, particulièrement parmi les critiques de l’âge baroque et de l’expressionnisme. L’autre de type « architectural » (l’homme est fabricateur par naissance), de nature aristotélicienne, serait le corollaire de l’idée artificialiste de l’art qui considère que la beauté est avant tout une construction fondée sur les proportions et l’accord des couleurs (p. 51). Cette autre technè/ars tout aussi présente dans les traités et adoptée par la critique depuis le XIIIe siècle, serait également l’un des principes instigateurs de la théorie maniériste des arts visuels (p. 48), mais elle n’aurait pas été suffisamment mise en relief. Selon le présupposé de Klein, l’homophonie entre ars et art serait à l’origine de l’équivoque qui expliquerait leur confusion.

           

         En s’appuyant sur l’important fonds des écrits sur l’art, et en particulier sur ceux qui discutent d’une façon résolument théorique, de l’art pris sous son aspect historique, esthétique ou technique, Klein va s’atteler à réinvestir ce sillon historique et à dégager plusieurs socles, qu’il distingue précisément pour agencer ses sources. Son « objet sera de montrer en détail comment furent reprises les anciennes idées d’Aristote et de ses continuateurs médiévaux », comment elles furent transposées ou modifiées selon les contextes, et pourquoi cette opération avait été possible et si longtemps couronnée de succès » (p.49). En exhumant et en sondant méticuleusement cette somme considérable d’écrits, Klein redonne sens à ce qui s’est déployé entre « l’artefactum médiéval des maîtres mécaniques et l’artifice du Cinquecento, comme entre les clients de l’artisan médiéval et le connaisseur qui apprécie la “main„ et l’ingéniosité technique d’un peintre maniériste », (p.56).

 

         Ainsi présentée, cette thèse se scinde en deux parties. La première « Technè » articulée en quatre chapitres, combine plusieurs pans pour circonscrire précisément ce concept et l’aborder d’un point de vue social, théorique et pratique. « Ces faits, prises de positions, [justifications], idées » constituent pour Klein ce qu’il qualifie de « données brutes de l’artificialisme au Cinquecento » (p.   189).  

           

         Le chapitre initial,  « Artisan et artiste », retrace l’évolution sociale du statut de l’artiste, Klein expose comment, d’abord regroupés en corporations, les artistes se sont élevés à un statut libéral. (p. 65). Cette nouvelle condition autorise à inclure nobles et patriciens, puisqu’auparavant « les corporations étaient généralement en droit d’interdire l’exercice du métier à quiconque n’avait pas été apprenti » (p. 66). Enfin l’analyse de l’exercice théorique qu’est le Paragone démontre comment métier et théorie donnent avant tout aux artistes une occasion de penser la finalité de leur pratique.  

           

         Le second chapitre, « La conception », est amorcé par l’étude linguistique de technè. De façon exemplaire, Klein opère une démonstration de sémantique lexicale, en identifiant quand et comment, dans sa dimension discursive, le sens de ce mot aurait été déplacé (p. 119). Ce chapitre lui permet de revenir sur ce paradoxal poncif de l’artiste maniériste qui, en prétendant que « la peinture peut exprimer n’importe quelle idée », met en avant sa liberté, alors que cours, clients et Église restaient les commanditaires des œuvres et présidaient ce mythique libre choix de l’artiste. (p. 131)

           

         Le troisième chapitre, consacré à « L’exécution », poursuit les exhumations des termes fossiles, qui, sous les exégèses de Klein, ressortent ravivés. En réinvestissant sémantiquement des expressions comme maniera, grazia ou même sprezzatura, Klein parvient à leur restituer toute leur épaisseur théorique. Dans le quatrième chapitre, Klein décèle « les premiers concepts hybrides qui sont comme les chenilles des thèmes du naturalisme baroque » (p. 177), ainsi le bizarre, le grotesque et le capricieux connurent durant le XVIsiècle une vogue presque continuellement croissante, inégalée depuis la fin du Moyen Âge. « Le maniérisme donne au bizarre un statut en quelque sorte officiel : le fantastico et l’imitativo (ou icastico) s’opposent d’égal à égal » (p. 177). Toujours en se référant aux solides préceptes des trattatistes, Klein révèle ce vaste mouvement des idées pour mettre en lumière les découvertes artistiques qui se sont imposées aux œuvres non en se conformant à une idée mais en suivant l’expérience, c’est suivant ce mouvement que l’artifice maniériste aurait rejoint les confins du naturalisme baroque. (p. 183).

 

         La seconde partie, « anthropologie de l’artifex », bien que moins développée, est toute aussi dense théoriquement. À travers elle, on conçoit qu’il s’agit de « suivre les principes de l’artificialisme du XVIe siècle italien “en action” », pour retracer cette anthropologie aristotélicienne de l’artiste. Toujours en écalant, pour ainsi dire, les différentes strates de la doctrine de l’Éthique à Nicomaque, Klein emprunte ce nouveau versant, en assignant « à l’art une place bien déterminée : il est une « vertu intellectuelle » ou plus exactement un habitus c’est-à-dire une capacité de l’esprit, acquise ou formée par l’exercice, par la « pratique » (p. 191). Point de raptus platonicien donc, l’art devait être acquis et appris. Selon, ce savoir faire/ habitus participant « à la fois de l’instinct et du réflexe conditionné, comme aussi de la rationalité du savoir et de la pratique du faire » (p. 192).

           

         Les quatre chapitres de cette seconde partie justifient la thèse de Klein : « L’esthétique du maniérisme n’est pas toute entière artificialiste ; (…) [mais] l’idéalisme, ou la théorie de l’art-discours, est également loin d’en donner la clef. Les deux conceptions qui paraissent si opposées quand on s’en tient à leur définition, sont en réalité l’avers et le revers d’une construction unique » (p. 273). Klein renouvelle avec subtilité la compréhension courante du maniérisme, qu’il caractérise par cette persistance des principes esthétiques artisanaux, qui s’est en partie constituée en réaction à l’humanisme et au principe classique de l’imitation. Selon Klein, les artistes maniéristes « affichent la mimésis par fidélité à l’humanisme et au classicisme, mais pensent et jugent au fond d’eux-mêmes en artificialistes, comme des doctes médiévaux » (p. 214).

           

         Pour son sixième chapitre consacré à l’artiste en action, Klein, à travers une importante réflexion sur la vie contemplative et la vie active, investit cette notion d’artifex vitae (p. 230). En investissant la figure de Michel-Ange, artiste indéniablement traversé par le dualisme de ces deux forces et désigné en quelque sorte comme la parangon absolu de cette thèse, Klein avance l’hypothèse que l’homme se conforme à Dieu, non seulement par la contemplation mystique mais aussi par la vita attiva et contemplative.

           

         Un nouveau pan de l’analyse de cette thèse apparaît dans l’avant-dernier chapitre : « La pratique ».  À en croire Klein, pour l’artiste maniériste, la pratique est une faculté qui a pour tâche d’opérer le raccord entre le savoir, dont l’objet est l’universel, et l’expérience qui se meut dans le singulier (p. 252). Toujours au gré de ces immersions dans les traités, on conçoit que pratica n’est pas uniquement réservé à l’opération « active » mais que ce terme s’étend à toutes les disciplines dans la mesure où elles sont opérantes ou appliquées, puisque « La “pratique” ne suit pas la théorie, et n’est pas une simple théorie imparfaite (…), elle est autre chose, elle a d’autres exigences, - elle est, en un mot, parallèle à la théorie, ni son application ni sa source. L’âge maniériste en déduira que la pratique est, en art, une théorie sui generis » (p. 254).

           

         Enfin le dernier chapitre « Le « second Dieu » permet à Klein de réinvestir ce thème mythique du Deus Artifex, qui serait « un des plus beaux exemples des transformations multiples que peut subir un lieu commun reflétant successivement les conceptions et doctrines artistiques de plusieurs siècles, sans que son énoncé souffre pour cela la moindre modification » (p. 264). Selon Klein, Le Dieu artisan aurait été transformé sous le filtre de Marsile Ficin en Dieu artiste.

 

         La publication de cette archive est importante et permet de saisir plus précisément le positionnement historiographique, critique et théorique de Robert Klein. Il est manifeste qu’au sein de cette Esthétique, se trouvent les germes de nombreux articles publiés dans La Forme et l’intelligible, on pense bien entendu à « Giudizio et Gusto dans la théorie de l’art au Cinquecento », ainsi qu’à « L’art et l’attention au technique ». Cette nouvelle publication dévoile la pensée de Klein sous un autre jour, et permet de définir plus précisément son arsenal théorique.

 

         On ne peut que regretter le caractère inachevé de cette thèse, qui prête à sa lecture un rythme étrange. Malgré ces singulières scansions, il faut reconnaître la qualité et l’exemplarité de ce précieux travail qu’il aurait été regrettable de garder plus longtemps celé. Félicitons et remercions le rigoureux effort accompli pour son édition. La diligente présentation de Jérémie Kœring favorise l’abord de cet objet singulier, qui, rappelons-le, est un dessein à la fois en suspens et polyphonique, si l’on considère l’important travail d’édition qui a présidé à la publication de cette archive. On regrette que la matérialité de ce dossier archivistique n’ait pas été plus mise en valeur. Il aurait été intéressant, mais surtout enrichissant d’un point de vue génétique, d’offrir de la visibilité à certains feuillets : on pense notamment à l’échange autour de l’ordonnancement  du plan de cette thèse entre Chastel et Klein, évoqué par Jérémie Kœring.

 

         Selon notre hypothèse, la thèse de Klein se situe dans la lignée de la conception historiographique de Julius von Schlosser. Ce membre de l’école de Vienne consigna dans son important recueil, Die Kunstlitteratur, publié en 1924, les bases d’une histoire de l’art qui se voulait solidement fondée sur les méthodes traditionnelles de la recherche philologique et historique. On reconnaît cette démarche dans l’organisation du texte de Klein. Bien que Schlosser et cet ouvrage apparaissent sporadiquement dans les notes de l’Esthétique de la technè, il est patent que Klein s’est inspiré du livre sixième consacré à la littérature d’art de la période maniériste, pour établir la trame théorique de sa recherche. Leurs textes présentent des analogies, notamment sur l’essence de l’art, mais aussi sur la caractère normatif de la théorie artistique du maniérisme.

 

         En suivant fidèlement le précepte de Schlosser, qui considérait avant tout son ouvrage comme un socle à enrichir, à travers ces remarquables exhumations archivistiques, Klein ne fait qu’attester que Die Kunstlitteratur n’est pas une somme monolithique, mais bel et bien une armature théorique pour qui cherche à établir une solide critique des sources écrites.

 

         En élaborant ainsi son Esthétique de la technè autour du paradigme de l’artiste plasticien, doté de la vitalité d’homo faber, comme nous l’avons écrit auparavant, Klein propose une nouvelle compréhension de la théorie de l’art et de l’esthétique dites « maniéristes » pour répondre à la tradition construite autour de l’aphorisme Deus artifex, divino artista (autrement dit de l’artiste magicien). Ernst Kris et Otto Kurz incarnent dans leur ouvrage, Die Legende vom Künstler, Ein Geschischtlicher Versuch (L'Image de l'artiste. Légende, mythe et magie. Un essai historique), 1934, le courant critique de cette conception générale de la Technè, et Klein le cite dès son introduction (p. 61 note 13). Il est intéressant de consulter leur ouvrage après la lecture de cette thèse, et de percevoir l’antagonisme de ces deux recherches. Rappelons qu’à travers leur enquête, Kriz et Kurz ont posé l’énigme de l’artiste comme une question sociologique. Le travail qu’il s’agissait pour eux de préparer pour leur (future) sociologie de l’artiste ne cherchait pas à étudier l’artiste en tant qu’incarnation de l’Homo Faber, plasticien, sculpteur, peintre ou architecte, puisque leur matériau, recueilli également selon les principes de la critique historique, fut, lui, essentiellement prélevé dans « les biographies d’artistes, dans son acceptation la plus large ».

 

         Le régime esthétique tel que Klein l’aborde a conservé toute sa légitimité plus de cinquante ans après, si l’on considère le rôle central accordé à la technè, au sein de toutes les études sur les nouveaux médias et les nouvelles technologies. Cette question sur le lien entre art et technique, qui remonte à l’étymologie même des termes Ars et τέχνη, et qui est centrale pour la redéfinition de toute esthétique, a déjà été reprise par de nombreux chercheurs, philosophes, historiens de l’art ainsi que par des artistes. Il nous semble patent que pour la période dite maniériste, en empruntant ce virage résolument anthropologique, Klein pose le cadre de l’une des heuristiques les plus fécondes. En désignant clairement la relation entre l’art et sa technique, il prouve qu’il est possible de mieux saisir des problèmes de définitions et de distinction en matière d’esthétique. Avant de caractériser tout objet esthétique comme tissu sensible, à savoir par exemple comme une question sociologique, ce qui est déterminé désormais comme « Art » selon le courant actuel, ne serait-il, pas d’abord, une praxis ?

 

         Klein, à travers sa recherche, a prouvé par une interrogation au plus près des pratiques artistiques que les typologies empiriquement préétablies se révélaient inexactes.

 

 

Sommaire

 

p. 9.     Avant-propos, par Henri Zerner.

p. 15    Présentation, par Jérémie Kœring.

 

p. 45    Robert Klein, L’Esthétique de la technè.

p. 47.   Introduction.

 

p. 63    Première partie : Technè

p. 65    Chapitre 1 : Artisan et artiste

            1. Corporations et académies.

p. 70    2. Idées sur l’enseignement.

p. 74    3. La dignité libérale.

p. 82    4. L’art et le sacré.

p. 84    5. L’unité des arts visuels.

p. 89    6. Le paragone.

p. 95    7. L’art pour les artistes.

 

p. 119 Chapitre 2 : La conception

            1. La technè.

p. 123  2. Les règles de l’art.

p. 126 3. La contingence de l’art.

p. 129  4. Hasard et liberté.

 

p. 143  Chapitre 3 :L’exécution.

            1. La dignité de la main et l’authenticité .

p. 149  2. Maniera

p. 158  4. L’art de cacher l’art ; la grâce.

 

p. 177  Chapitre 4 : La singularité.

            1. Le bizarre,  le grotesque et le capricieux.

p. 180  2. Du mensonge à l’illusion.

 

p. 189 Seconde partie : Anthropologie de l’artifex.

 

p. 191  Chapitre 5 : La contemplation.

            1. Vertu, art et science.

p. 194. 2. L’artifice contre l’imitation.

p. 202  3. Artifice et beauté.

p. 207  4. L’artifice et l’idéalisme esthétique.

p. 210  5. Le contenu positif de l’esthétique de l’artificialiste.

p. 214  6. La maraviglia.

 

p. 229 Chapitre 6 L’action.

            1. Contre-Renaissance et vie active.

p. 233  2. Action et contemplation chez Michel-Ange.

 

p. 251  Chapitre 7 : La pratique

            1. Théorie et pratique.

p. 256  2. Il guidizio

 

p. 263  Chapitre 8 : Le « second Dieu »

            1. Deux artifex.

p. 266  2. Les « trois causes » : Deux, Natura, homo

 

p. 273  Remarques finales

 


N.B. : Sabine Guermouche prépare actuellement une thèse de doctorat sous la direction de Giovanni Careri (EHESS) sur "La fresque du Palais de la raison de Padoue au sein de l’Atlas Mnémosyne".