Bruneau, Philippe: Etudes d’Archéologie Délienne. Recueil d’articles rassemblés et indexés par Jean-Charles Moretti. BCH Supplément 47. Format 18,5 x 24 cm, XIV + 1002 p. ISBN 2-86958-154-8, 50 Euros
(Ecole française d’Athènes, Athènes 2006)
 
Compte rendu par François Queyrel, Ecole pratique des Hautes Etudes (Paris)
 
Nombre de mots : 715 mots
Publié en ligne le 2010-12-22
Citation: Histara les comptes rendus (ISSN 2100-0700).
Lien: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=126
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Ce recueil d’articles réunis en un épais volume d’un peu plus de mille pages se justifie d’abord par la volonté d’honorer la mémoire de Philippe Bruneau disparu en 2001. Jean-Charles Moretti a choisi de réimprimer ici les principaux articles que celui-ci avait publiés entre 1961 et 2002 sur Délos, très souvent sous le titre de « Deliaca », en les faisant précéder d’un très court avant-propos et d’une « bibliographie délienne » qui groupe chronologiquement l’essentiel de la production scientifique de Ph. Bruneau, articles et ouvrages ; des indices constituent le principal apport du volume, en permettant de s’orienter dans cette bibliographie foisonnante. Le format de la collection des Suppléments au Bulletin de correspondance hellénique convient parfaitement pour la réimpression d’articles parus en majorité (25 sur 34 en tout) dans le BCH et cette même collection des Suppléments au BCH. L’impression est soignée et le volume, même s’il n’est pas cousu, paraît suffisamment bien relié. Les figures ne sont cependant pas toutes correctement réimprimées dans le volume (voir par exemple p. 319, fig. 10 ; p. 387, fig. 10-11) : il aurait fallu reproduire les clichés originaux pour éviter cette dégradation de la qualité ; il aurait au moins été possible pour cette collection d’utiliser de nouveaux tirages des clichés de l’École française d’Athènes (voir par exemple le groupe d’Aphrodite et Pan, p. 940, fig. 8).

 

On pourrait se demander pourquoi, alors que le BCH est accessible en ligne sous Persée (http://www.persee.fr) et sous Cefael (http://cefael.efa.gr/site.php), on réimprime des articles faciles à consulter dans leur majorité. Sans formuler cette question l’avant-propos (p. VII) insiste sur la mise en relation avec les monuments de Délos que permet désormais l’indexation des articles publiés. J’ajouterais que le site Persée ne reproduit que peu de figures : les articles y sont précédés de cet avertissement précautionneux : « Cet article contient des illustrations pour lesquelles nous n’avons pas reçu d’autorisation de diffusion ». Quant à Cefael, si les illustrations sont reproduites dans une qualité dégradée, le texte ne permet pas de recherche plein texte. Il est enfin bien pratique d’avoir tous les articles réunis en un seul volume plutôt que de devoir feuilleter différentes livraisons d’un périodique.

 

L’organisation du volume est chronologique, ce qui est la présentation la plus simple, mais qui amène à dissocier des articles qui abordent le même thème, sans que ce choix soit explicité dans l’avant-propos, où, en revanche, sont soulignées l’importance et la cohérence des études de Ph. Bruneau sur Délos. On ne peut que souscrire à ce jugement. On retrouve dans ces articles les principaux champs d’intérêt de Ph. Bruneau, qui ont abouti à des publications dans la collection de l’Exploration archéologique de Délos sous forme de corpus ou de monographie de fouille : les lampes, les mosaïques, l’architecture domestique et la topographie délienne.

 

L’apport de Philippe Bruneau se caractérise par une attention constante apportée à la méthodologie : ce goût pour la théorie a connu son épanouissement dans les articles de la revue RAMAGE où Ph. Bruneau explorait les champs nouveaux de l’ « archéologie du monde moderne ». Sur Délos il reste plus près du terrain qu’il connaît parfaitement. Sa personnalité passionnée anime la prose : Ph. Bruneau vante les « bienfaits de la polémique » (p. 424), dont certains de ses collègues, notamment italiens, de Filippo Coarelli (p. 716-717) à Giuseppe Pucci (p. 418-427), ou encore Ernest Will (p. 411), ont fait les frais.

 

On retrouve enfin dans un certain nombre de ces études la bonne connaissance du grec qui permet par exemple à Ph. Bruneau d’éclairer la signification exacte de l’expression de « pêcheur délien » (p. 473-478, p. 667-668). L’intérêt de Ph. Bruneau pour l’iconographie se révèle en particulier dans ses trois études sur Isis Pélagia (p. 1-12, p. 13-20, p. 418-427) : la notion de contamination est introduite dès la première étude ; l’existence d’un original statuaire est réfutée ; c’est dans le dernier article, publié en 1978, qu’apparaît la distinction entre « schème » et « thème » appliquée à l’analyse iconographique.

 

On reconnaîtra dans la production délienne de Philippe Bruneau le goût des années 1970 pour l’application des théories linguistiques à d’autres champs scientifiques. En l’occurrence le procédé a le mérite d’expliciter les présupposés de la démarche archéologique en les disséquant. Mais autant que pour sa leçon de méthode, l’ouvrage vaut pour le rassemblement de données éparpillées et il faut savoir gré à l’éditeur d’avoir fait œuvre utile.